L’étanchéité liquide : des systèmes multi-usages


Qu’ils soient destinés à la toiture, aux balcons, loggias ou terrasses, les systèmes d’étanchéité liquide (SEL) ont une fonction unique : l’étanchéité à l’eau. Pour ce faire, ils bénéficient de caractéristiques qui leur sont propres, telles la résistance à la fissuration et une grande élasticité. Des procédés appliqués à froid, qui forment un revêtement étanche, seul système d’étanchéité directement circulable, ne nécessitant pas de protection lourde.

Par nature, les systèmes d’étanchéité liquide (SEL) ont pour objectif de rendre un support, quel qu’il soit, étanche à l’eau. Contrairement aux revêtements de type asphalte, bitume, membrane PVC, EPDM, etc., ces produits se présentent sous une forme liquide ou pâteuse, appliquée directement sur le support. Ils ont l’énorme avantage d’être mis en œuvre à froid, et donc sans développement de flamme ou de chaleur. « Cette propriété est de plus en plus souvent recherchée par les maîtres d’ouvrage, car elle leur évite d’en passer par la demande de permis de feu. A New-York, il ne se pose plus un mètre carré de bitume », explique Curzio Larcher, responsable national étanchéité liquide chez SOPREMA Entreprises.

De fait, il s’agit d’un mode d’exécution particulier de l’étanchéité des parties courantes des bâtiments : plus concrètement, les résines liquides forment après polymérisation un revêtement adhérent au support et résistant à la fissuration. Sous cette dénomination se regroupent des produits adaptés à des configurations bien particulières et qui possèdent des caractéristiques de résistance liées, dans la plupart des cas, à leur capacité à supporter une circulation piétonnière, qu’elle soit privative ou publique, voire routière, plus ou moins sévère. Leur tenue à la fissuration, en raison de l’élasticité élevée des systèmes, est remarquable : élongation à la rupture sur fissures instantanées de 6 mm pour les plus performants d’entre eux.

Ces techniques ne sont pas concurrentes des procédés habituels d’étanchéité, mais complémentaires. Car les systèmes s’appliquent là où les autres ne peuvent être mis en œuvre ou lorsqu’ils sont mal adaptés, ou encore lors d’opérations spécifiques de réfection. « L’avantage de ces procédés est qu’ils épousent n’importe quelle forme. Y compris sur des jonctions de matériaux. Ainsi il n’y a pas d’intervention manuelle au niveau d’une jonction ou d’une soudure, comme c’est le cas avec le bitume et le PVC. Donc le risque de décollement n’existe pas. Ils forment une barrière continue sans joints qui s’oppose à la pénétration de l’eau », précise Curzio Larcher.

 

Variétés des usages

Résultat, ils ont des domaines d’application extrêmement variés, en neuf comme en rénovation : « il y a des marchés où ils sont de plus en plus demandés, comme les ouvrages d’art, ponts, passerelles, etc. Il y a aussi les bassins d’ornement, les fontaines… Et tous les ouvrages architectoniques, comme les dômes, les casquettes en toiture difficilement traitables avec un système traditionnel, détaille Curzio Larcher. Et d’ajouter : « en revanche, ils sont encore rares en toiture-terrasse avec isolant, ce qui n’est pas le cas en Allemagne. » Selon la Chambre syndicale française de d’étanchéité, ils ne représentent, en effet, que 3 à 4 % des systèmes mis en œuvre en toiture : « Le coût est encore un frein. »

Cela étant, les balcons situés en encorbellement de façade ou les loggias en retrait sont leur domaine de prédilection, comme les coursives qui dominent des volumes non clos accessibles à la circulation et au stationnement piétonnier. Il en est de même des terrasses accessibles qui recouvrent des volumes clos et habitables, ou des tribunes et gradins des installations sportives de plein air qui recouvrent des locaux de fonction comme les vestiaires.

 

Options produits

Au chapitre produits, plusieurs options sont envisageables, plusieurs types existent : « les résines, qui représentent la plus grosse part du marché, sont les polyuréthanes monocomposants. » En plus d’être légères et de faible épaisseur, elles sont très résistantes : « si l’application est réalisée dans les règles de l’art, elles sont quasi indestructibles, avec des coefficients d’adhérence qui sont gigantesques ». En revanche, elles sont sensibles à l’humidité lors de l’application et ont un temps de polymérisation assez long (entre 10 et 15 heures) et des temps de recouvrement de l’ordre de 48 à 72 heures. « Il faut avoir une bonne fenêtre météo pour l’application, car il n’est pas possible d’appliquer plus d’une couche par jour, ce qui est une contrainte pour les petits chantiers. »

Autres résines de plus en plus souvent mises en œuvre, les méthacrylates de méthyle ou PMMA (Poly méthyl méthacrylate) : « bicomposantes (résine et catalyseur), elles ont l’avantage d’être très réactives (15 à 20 min maximum) ; il est donc possible d’enchaîner les couches du primaire jusqu’à la finition, puisqu’il n’y a pas de délai. » Mais cette vitesse de polymérisation peut parfois être source d’erreur : « c’est l’avantage et l’inconvénient du système. Les techniciens pensent que s’ils mettent moins de catalyseur, la réaction sera moins rapide. Ce qui est faux, car la vitesse de la polymérisation dépend de la chaleur et de la masse. Donc le dosage du catalyseur est réalisé en fonction de la température extérieure. »

Les étancheurs ont également à disposition les époxy et les acryliques : les premières, compatibles avec les autres systèmes, sont utilisées en primaire sur des supports humides ou poreux en raison de leur action de pare-vapeur. Les secondes sont principalement dédiées aux toitures bac acier ou fibre ciment à pente. « C’est un marché en perte de vitesse car avec la fibre ciment, la réglementation est de plus en plus draconienne en matière de préparation et de récupération des eaux de lavage ».

 

Préparation des supports

Reste que le système ne fait pas tout. La réussite de la mise en œuvre dépend énormément de la préparation des supports : « c’est même fondamental. Vous pouvez avoir le meilleur produit du monde, si le support n’est pas bien préparé, le résultat ne sera pas à la hauteur. » Pour qu’il le soit, la préparation comportera au minimum un ponçage mécanique, un rabotage ou un grenaillage. Si le support est irrégulier, il sera nécessaire de le reprendre avec des primaires et/ ou des mortiers de résine adaptés. Notamment pour recréer la forme de pente : « aujourd’hui, 80 à 90 % des ouvrages en résine sont accessibles, la pente est donc obligatoire pour l’évacuation des eaux de pluie ».

Le choix d’un procédé plutôt qu’un autre repose davantage sur le type de chantier que sur le système utilisé : « il n’y a pas de règle, mais il est préférable d’utiliser les métacrylates sans délai de recouvrement pour les petits chantiers et les résines polyuréthane pour les gros. Lorsque l’on s’attaque à un immeuble ou aux tribunes d’un stade, la problématique des délais de recouvrement est moindre, c’est alors davantage une question d’organisation de chantier. »

 

Finitions

Ces systèmes présentent aussi de nombreuses options de finition : teinté uni, marbré ou pailleté, sablé avec éventuellement un système d’anti-dérapance associé. Résultat : ils sont de plus en plus utilisés comme revêtements décoratifs et particulièrement appréciés pour créer des ambiances minérales, des cheminements ou encore tout type d’expression architecturale, y compris des logos ou reproduction de dessins originaux. Pour autant, la considération esthétique n’est pas, selon Curzio Larcher, le premier argument à mettre en avant : « oui, on peut faire de belles choses. Mais j’invite nos clients maîtres d’ouvrage à ne pas occulter le côté technique. Il est important de comprendre qu’une étanchéité circulable n’est pas un revêtement décoratif ; qu’il y a des tolérances de planimétrie qui sont importantes ; et que la garantie ne porte que sur l’étanchéité. Ensuite, ils seront très agréablement surpris par le rendu esthétique.