Jeux d’ombre et de lumière en façade et toiture


Lorsque l’on construit un bâtiment, quelle que soit sa destination, la lumière naturelle est un bien précieux. Les raisons de s’y intéresser sont nombreuses : confort des usagers, économies d’énergie, respect de l’environnement, etc. Pour profiter de ses bénéfices, il convient, dès la phase de conception, de réfléchir aux systèmes d’ombrage en façade et toiture. L’objectif : trouver le bon équilibre entre ombre et lumière.

 

Photo : © Gaël Arnaud

 

Un espace baigné de lumière naturelle sera toujours plus accueillant, les volumes et l’architecture y seront davantage valorisés. Rodolphe Godin, directeur général de Tellier Brise-Soleil et directeur marketing d’Adexsi, constate tous les jours que les concepteurs ne font plus l’impasse sur cette question : « La lumière naturelle est devenue un élément essentiel de la conception des bâtiments. Il est normal d’y penser, ce qui n’a pas toujours été le cas ». Pour lui, il y a eu un changement d’échelle ces dernières années : « Ce n’est plus le fait de quelques architectes précurseurs, il y a une vraie demande de la maîtrise d’ouvrage. Par exemple, l’éclairage naturel est aujourd’hui l’un des principaux critères pour choisir un appartement. Idem pour les bureaux – certaines sociétés mettent d’ailleurs en avant la qualité de leur bâtiment baigné de lumière naturelle pour recruter ».

 

Photo : © G Perret

Ce changement d’échelle est bien sûr lié à la dernière réglementation thermique (RT 2012), qui a imposé des surfaces minimales de vitrage en fonction de la taille des locaux et remis au goût du jour, avec la prise en compte du Bbio (voir Glossaire), l’architecture bioclimatique. Mais c’est surtout par le prisme du confort d’usage et de la santé que l’éclairage naturel des locaux s’est imposé. En effet, les neuroscientifiques Photo : © G Perretattestent que le manque de lumière naturelle a un impact sur le cycle biologique et peut engendrer des troubles du sommeil ou digestifs, de l’irritabilité et même des dépressions… À l’inverse, elle améliore notre santé et notre bien-être au quotidien. Elle peut même favoriser l’apprentissage et la productivité.

Son caractère vertueux est aussi à chercher du côté des économies d’énergie et du respect de l’environnement. Selon l’Ademe, en la couplant au pilotage des luminaires en fonction de l’intensité lumineuse, la consommation d’éclairage des bureaux peut être réduite de 30 à 50 %. De son côté, le bureau d’études Tribu Energie a effectué, pour le compte du GIF Lumière(1) qui regroupe les fabricants d’équipements de toitures, une étude d’impact de l’éclairage naturel sur le bilan énergétique des bâtiments. Cette étude a porté sur un bâtiment répondant à la réglementation RT 2012 au sein de deux zones géographiques : H1a (Paris) et H3 (Marseille). Dans les deux cas, elle a montré les gains énergétiques d’un bon éclairage naturel. Pour y parvenir, la recommandation du GIF Lumière est simple : assurer à l’intérieur d’un bâtiment une autonomie d’éclairage naturel pendant 50 % du temps, avec un niveau de 300 lux, ce qui permet d’optimiser la consommation énergétique. Ceci peut générer, selon les types de locaux et de région climatique, des gains de Cep(2) de 10 à 20 %.

 

Photo : Tellier Brise-Soleil

 

CONTRÔLER L’ENSOLEILLEMENT

La lumière naturelle est vertueuse mais elle ne doit pas devenir source d’inconfort, de surchauffe ou d’éblouissement. C’est là qu’intervient le concept d’ombrage. À ne pas confondre, précise Rodolphe Godin, avec l’occultation : « Occulter signifie obturer, empêcher la lumière de pénétrer dans le bâtiment. En revanche, quand on s’intéresse à l’ombrage, on pense autant à l’ombre qu’à la lumière. Un ombrage réussi laisse passer la lumière, tout en réduisant les effets négatifs du soleil. Il s’agit de la faire pénétrer là où elle est souhaitable, au moment où elle est nécessaire, et sans éblouissement ».Résultat : jamais l’architecture bioclimatique n’aura eu autant de sens. L’objectif est de contrôler l’ensoleillement par le toit et les façades en favorisant les apports solaires lorsqu’ils s’imposent et en les atténuant lorsqu’il y a risque d’inconfort. Et ce, en jouant sur deux plans : les dispositifs spécifiques d’ombrage et le travail sur l’architecture du bâtiment. Lesquels se définissent en fonction des saisons et de la course du soleil en créant, ou pas, des masques architecturaux et en installant, lorsque c’est pertinent, des systèmes d’ombrage. Ici, les outils informatiques, particulièrement ceux de simulation, sont d’une grande utilité.

Stéphane Fayard, directeur national façade SOPREMA Entreprises, constate dans sa pratique quotidienne que cette recherche d’optimisation des apports solaires, thermiques et lumière naturelle, est visible sur les bâtiments de dernière génération : « Les équipements d’ombrage et les dispositifs architecturaux, tels que les casquettes en débord de couvertures, les volumétries pour créer des ombres portées, la végétalisation des façades qui joue à la fois sur le thermique et l’ombrage sont de plus en plus répandus et signent les façades de ces dix dernières années ». « La fonction esthétique des dispositifs d’ombrage est très importante lorsque l’on parle de façade, mais aussi en toiture. Le choix des architectes repose autant sur l’aspect fonctionnel que décoratif », précise à son tour Rodolphe Godin. En résultent des façades qui, à elles seules, sont des brise-soleil avec des jeux de lames métalliques, horizontales et/ou verticales, qui les habillent complètement.

HOMOGÉNÉITÉ DE L’ÉCLAIRAGE NATUREL

Des choix architecturaux dépendront donc les dispositifs à mettre en place pour le contrôle solaire et l’ombrage. De nombreux produits, systèmes et équipements techniques permettent de gérer au mieux la luminosité et le choix est vaste : outre les matériaux transparents et translucides (vitrages de dernière génération, membrane ETFE, polycarbonate, etc.) à disposition, stores, volets roulants, brise-soleil, coupoles en toiture, lanterneaux, etc., sont également envisageables. Il n’y a pas de concurrence entre les différentes solutions, juste une complémentarité. En revanche, cela passe nécessairement par une étude approfondie. C’est pourquoi la mise en place de ces dispositifs est réfléchie en amont du projet. Il est recommandé de suivre trois étapes pour atteindre le résultat recherché : déterminer l’autonomie de lumière naturelle dont on a besoin, assurer une bonne homogénéité de l’éclairage et définir les surfaces éclairantes nécessaires pour y répondre. « C’est tout le sens de notre marque Genatis qui apporte dans ce domaine une assistance technique au maître d’œuvre », se félicite Rodolphe Godin (voir encadré Trois questions à).

VARIÉTÉ DE SOLUTIONS TECHNIQUES

En façade, les systèmes d’ombrage disponibles sont très variés. « L’offre est relativement bien structurée et nous arrivons à répondre aux demandes de la conception. Nous nous concentrons sur la justification règlementaire et technique des produits. Car nous travaillons dans le cadre d’Avis Techniques et les brise-soleil sont, pour certains d’entre eux, en dehors des radars. Ce qui impose parfois de recourir aux ATEx (Appréciation technique d’expérimentation) du CSTB », souligne Stéphane Fayard. Dans tous les cas, la mise en œuvre de procédés d’ombrage en façade implique une étude de conception sérieuse. « Il y a des contraintes importantes en termes de portée et de prise au vent, certains éléments pouvant être en porte-à-faux. Nous utilisons des logiciels de conception et, en fonction des dimensions des châssis, nous pouvons être amenés à retenir des solutions spécifiques : par exemple, un câblage ou des tirants en inox peuvent assurer la prise au vent, ou une reprise de poids propre des ventelles ou des éléments constituant les brise-soleil », détaille Stéphane Fayard. « Nous avons aussi la possibilité d’automatiser les systèmes : programmation à l’avance ou avec des détecteurs qui permettront de suivre la course du soleil au fur et à mesure de la journée », renchérit Rodolphe Godin.

PENSER À LA RÉNOVATION

En toiture, les systèmes sont tout aussi nombreux et, comme pour la façade, c’est une étude qui déterminera les solutions les mieux adaptées en fonction des besoins, lesquels ne seront pas les mêmes dans une usine, un supermarché ou un gymnase : « Il faut trouver le bon équilibre, résume Rodolphe Godin. Avec Adexsi, nous proposons de nombreuses solutions techniques : des lanterneaux avec un remplissage polycarbonate plus ou moins opalescent que nous pouvons associer à des systèmes d’ombrage avec voûtes placées au droit desdits lanterneaux. Il y a pléthore de solutions ».Autre point essentiel pour Rodolphe Godin, le secteur de la rénovation : « Les procédés d’ombrage, façade et toiture, ne sont pas réservés à la construction neuve, comme on a trop souvent tendance à le croire. Quand un bâtiment a une pathologie existante – éblouissement, surchauffe –, il existe toujours des solutions. Avec ces systèmes, on arrive à régler facilement un problème de confort thermique », conclut-il.Photo : Tellier Brise-Soleil

BRISE-SOLEIL RECTI’LIGNE

Tellier Brise-Soleil propose un choix important de brise-soleil en aluminium à lames orientables ou fixes, rectangulaires, ailes d’avions, trapézoïdales. Toutes sont proposées pour une mise en œuvre à l’horizontale ou à la verticale. En parallèle, dans une démarche d’innovation continue, de nouvelles solutions sont en cours de développement pour répondre aux demandes des architectes. Actuellement, Tellier Brise-Soleil développe, par exemple, des lames d’habillage de façade sans fixation apparente à 2 profils clipsables en aluminium extrudé (Harmonie Façade) ou des lames de brise-soleil à profil monobloc en aluminium extrudé (Rectiligne (RL) RL200x50, RL250x100, RL200x100, RL300x100 et RL400x100). Système que les architectes apprécient beaucoup, le brise-soleil Recti’ligne est constitué de lames rectangulaires. Recherché en raison de sa géométrie et de ses lignes épurées, disponible en lames fixes ou orientables, ce brise-soleil vertical lames couchées ou debout s’intègre esthétiquement sur toutes les constructions, en neuf comme en rénovation et quels que soient le style architectural et la nature de la façade. Plusieurs systèmes de fixation sont proposés : pose entre embouts à oreille, pose entre embouts porteurs ou encore pose entre, peignes, entre plats et entre consoles… Un large choix de finitions – thermolaquage suivant le nuancier RAL (60-80 microns), imitations bois (60-80 microns) ou produits anodisés (20 microns) – répond à l’ensemble des demandes de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre.

 

Photo : Tellier Brise-Soleil

 

Chiffres clés

80 % le temps que nous passons à l’intérieur des bâtiments.

300 lux 50 % du temps sur 90 % de la surface : seuil minimal à prendre en compte pour un bon éclairage naturel des bâtiments.

 

Glossaire

 

Facteur de lumière du jour (FLJ)

C’est le rapport de l’éclairement naturel reçu en un point intérieur d’un bâtiment par rapport à l’éclairage extérieur simultané sur une surface horizontale en site parfaitement dégagé et par ciel couvert. FLJ = E intérieur / E extérieur (%).

BBIO

Le Bbio, innovation majeure de la RT 2012 par rapport à la précédente, valorise la qualité intrinsèque de la conception bioclimatique du bâti en optimisant l’orientation, les apports solaires, l’éclairage naturel, etc. La démarche est basée sur la méthode de calcul règlementaire RT 2012 avec le moteur Th-BCE du CSTB. La RE 2020 en reprendra le principe.

Brise-soleil

Dispositif externe, fixe ou orientable, limitant l’arrivée des rayons du soleil sur une façade vitrée. Il s’agit d’un élément architectural servant à diminuer l’inconfort lié au rayonnement solaire.

 

QUIZ
TESTEZ VOS CONNAISSANCES

1
La lumière naturelle, c’est bon pour la santé. Vrai.

La lumière active l’horloge interne, notamment la production d’hormones agissant sur la concentration, l’apprentissage, la vigilance, l’humeur, les cycles veille-sommeil… Des salariés profitant d’un bon niveau d’éclairement naturel sont moins soumis aux dépressions saisonnières, à la fatigue psychologique et au stress.

2
Laisser pénétrer la lumière naturelle permet de réaliser des économies d’énergie. Vrai.

Du point de vue énergétique, l’éclairage naturel peut être considéré comme une énergie renouvelable. Elle apporte, à condition d’être bien amenée, éclairage naturel et chaleur dans les bâtiments. La réglementation thermique (RT 2012 et bientôt RE 2020) favorise ces apports naturels par une valorisation de l’architecture bioclimatique (Bbio).

3
Pas besoin d’étude, il suffit de respecter les seuils fixés par la réglementation thermique. Faux.

Bien gérer la lumière naturelle, et donc l’ombrage, demande des études précises pour définir des objectifs de facteur de lumière du jour (FLJ), calculés notamment à partir de bases de données météorologiques. Il existe aussi des logiciels de simulation de lumière du jour : utilisés par les architectes et par les bureaux d’études thermiques et d’éclairage, ils font partie intégrante du processus de conception d’un bâtiment.

4
L’ombrage, façade ou toiture, regroupe toutes les mesures passives permettant de limiter l’entrée du rayonnement solaire excessif. Vrai.

Le rayonnement solaire est recherché en hiver pour chauffer le bâtiment, mais peut devenir une source d’inconfort en été. Les protections solaires utilisées pour créer l’ombrage permettent de régler ce problème sans nuire à la luminosité.

5
La lumière naturelle peut nuire au confort d’été et aux économies d’énergie. Faux.

À condition de prévoir des systèmes d’ombrage efficaces qui contribuent, avec la ventilation naturelle, à supprimer ou à réduire la climatisation. L’augmentation du pourcentage d’éclairage naturel améliore le bilan énergétique du local. En toiture, avec des lanterneaux en fonction de la zone climatique et de la hauteur du bâtiment, le gain énergétique est compris entre 20 et 60 %.

(Source : Guide de l’éclairage naturel zénithal pour les bâtiments industriels, commerciaux et tertiaires. Guide réalisé par GIF Lumière en partenariat avec l’Ademe et le Syndicat de l’éclairage)

 

 

3 questions à RODOLPHE GODIN,
DIRECTEUR GÉNÉRAL DE TELLIER BRISE-SOLEIL
ET DIRECTEUR MARKETING D’ADEXSI

 

Depuis quand l’offre « ombrage » existe-t-elle chez SOPREMA est comment est-elle structurée ?

Avec Adexsi, intégré à SOPREMA, nous nous intéressons depuis longtemps à la démarche qui consiste à gérer les énergies naturelles par la façade et le toit. Qu’il s’agisse de lumière et de ventilation naturelle, de pilotage, etc. C’est après le rachat d’Hexadome par SOPREMA en 1993, société très orientée sur la lumière naturelle zénithale avec les lanterneaux d’éclairement et de désenfumage, que s’est posée assez rapidement la question de l’ombrage en toiture. Depuis, Adexsi a racheté SIH en 2015, spécialiste reconnu de l’éclairage, de l’aération et du désenfumage naturel, puis regroupé l’ensemble sous la marque Bluetek. Autre achat en 2018 avec Tellier BriseSoleil, entreprise spécialisée en protection solaire, habillage de façade et ventilation naturelle. Ce qui a complété l’offre en toiture par une offre d’ombrage en façades.

Vous avez dernièrement créé la marque Genatis, de quoi s’agit-il ?

C’est une marque qui propose une offre globale autour de la gestion des énergies naturelles : ventilation naturelle, rafraîchissement adiabatique, façade bioclimatique, déstratification de l’air et bien sûr lumière naturelle et ombrage (fixe et mobile). Elle n’a pas à proprement parler de produits, elle agrège les expertises des sociétés du groupe Adexsi autour de cette thématique. C’est un concept, un pôle technique qui, via des études spécifiques, aide les maîtres d’ouvrage et les maîtres d’œuvre à prendre en compte le bâtiment dans son ensemble, pour en tirer le meilleur au niveau de la gestion des énergies naturelles.

Concrètement, comment cela se passe ?

Nous réalisons à la demande de la maîtrise d’œuvre des études avec ce pôle technique pour une aide à la conception et des conseils sur les dispositifs techniques à installer. Nous travaillons sur des thématiques particulières, comme l’éclairage ou la ventilation naturelle, mais toujours avec à l’esprit la prise en compte du bâtiment dans sa globalité. Nous allons aussi prochainement construire un bâtiment à Luynes (37), avec cette approche globale. Ce sera un laboratoire pour tester l’ensemble des solutions du Groupe valorisé par Genatis.